Guillame Tell : il est le symbole de la lutte des suisses contre les Habsbourg d'Autriche. On lui prête aussi volontiers l'indépendance du pays. Une "rural legend" qui n'a rien à envier aux scénarios américains les plus ambitieux...

La route est longue jusqu'en Suisse centrale : les Waldstaetten pour les intimes. Uri, Schwyz et Unterwald (Nidwald et Obwald) : les valeureux cantons fondateurs de la Confédération suisse. C'était il y a plus de 700 ans, à l'époque des baillis, des traités secrets et des légendes. Les légendes... c'est ce qui nous amène un frais matin d'automne à Altdorf, la capitale du canton d'Uri.


Altdorf et sa chapelle, ses cîmes blanches, son lac au ras des rives, ses cars de touristes. Tôt, ce frais matin d'automne, notre enquête débute sur la place du village, au pied de LA légende suisse, le garant de son indépendance, le patron des tireurs d'élite : Guillaume Tell... ou plutôt ici : Wilhelm Tell.

Son histoire ? Il suffit de regarder derrière, les fresques peintes sur la tour pour la connaître. Les Suisses sont sous domination autrichienne et ... provocation suprême, le bailli Gessler ordonne à tous les villageois de s'incliner devant un chapeau en signe de soumission. Tell arrive ce matin au marché, il ne voit même pas le chapeau et de toutes façons, il s'en fout. Pour le punir, Gessler lui demande de choisir entre le cachot ou la légendaire épreuve de la pomme, posée sur la tête de son fils. Tell soulève sa lourde arbalète et tire, au centre de la pomme.

Légende ou personnage historique ? Voilà le but de notre enquête au berceau de cette petite partie d'humanité. Nous ne partirons pas avant de savoir enfin si le village d'Altdorf nous a menti...

Tiens, prenons ce groupe de villageoises, elles doivent bien avoir une idée... alors Guillaume Tell a-t-il vraiment existé ?

INTERVIEW

Chez les plus aînés visiblement pas de doute. Mais les plus jeunes pensent peut-être autre chose ?

INTERVIEW

Premier indice : plus on est vieux, plus on y croit. Peut-être à force de voir la statue. Les plus jeunes encore, on n'a pas essayé tiens ?

INTERVIEW

(Attention la voiture !) Alors comme ça, c'est ce qu'on vous apprend à l'école? Info à vérifier, mais ça friserait le révisionisme.
Notre enquête nous emmène ensuite à l'Office du tourisme d'Altdorf, qui s'appelle "die Tell Haus", la maison de Tell, on ne s'est pas trompés.

Alors info ou intox ? ici, on a envie d'y croire très fort, car Guillaume Tell est sur toutes les offres, ciruits organisés, Hôtel, restaurant, sans Guillaume Tell, plus de touristes, plus de touristes, plus d'argent. Et les jeunes habitants ne s'y trompent pas.

INTERVIEW

Loin de l'animation d'Altdorf, nous poursuivons notre pélerinage, en nous enfonçant plus loin encore dans la vallée du Schächental. Bürglen, modeste bourgade d'une poignée d'âmes, à quelques minutes en voitures d'Altdorf, mais à l'époque une bonne heure sans doute à pied. C'est ici qu'est né Guillaume Tell, c'est ici aussi qu'il a vécu.

Altdorf aurait donc volé la célébrité à Bürglen. Non, sans doute. A Bürglen, on ne veut pas de la célébrité. Les villageois ont bien édifié une statue à la mémoire de leur héros, mais elle est plus modeste qu'à la capitale. Ici à Bürglen, on aime Guillaume Tell, tout simplement avec le coeur. Si vous en doutez encore, jetez un oeil à la chapelle, au détour du cimetière. Une chapelle ardente, entretenue depuis des siècles par des villagois convaincus, même si ils ne savent pas bien pouquoi ils y croient.

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Notre enquête nous emmène ensuite devant cette porte close. Bürglen abrite le petit Musée Tell, fermé, comme beaucoup de jours dans l'année. Bürglen a au moins récupéré ça. Pas d'info devant la caméra, mais un fax. Et c'est sans doute la piste la plus sérieuse de notre enquête : il mentionne l'existence d'un "Livre Blanc".

La plus vieille description de l'histoire de Guillaume Tell, vous la trouvez dans le soi-disant "LIVRE BLANC" de Sarnen. Ce manusrcit fut écrit entre 1471 et 1473 et se base probablement sur un modèle des années 1407à 1418.

Mais Guillaume Tell est né 100 ans auparavant... 100 ans pour déformer l'histoire , ou l'inventer. Guillaume Tell a-t-il vraiment existé ?

Nous quittons un instant l'étroite vallée, nous revenons sur nos pas, au bord du tentaculaire lac des 4 cantons. 4 bras que se disputent des villes et des campagnes. C'est ici que se poursuit la légende de Tell. Après avoir percé de sa flèche la pomme, le méchant bailli Gessler lui demande à qui était destinée la seconde flèche. Tell lui répond que si il avait échoué, elle aurait fini dans son coeur. Tell est alors enchaîné et emmené à la forteresse de Küssnacht, par bateau, sur ce lac qu'il connait si bien. La tempête se lève et le bailli Gessler ordonne à Tell de prendre le gouvernail. Tell guide habilement le bateau, jusqu'à une dalle de pierre, qui avance dans le lac et il prend la fuite, repoussant du pied l'embarcation. Mais l'aventure ne se termine pas là. Tell piste le bailli et tire cette fois la flèche en plein coeur, le bailli est mort. C'est le signal de la rebellion suisse, le point de départ de son indépendance.

Aujourd'hui, l'endroit a été baptisé "Tell Platte", le plateau de Tell. Une chapelle y est érigée, Tell toujours, Tell encore, et ça marche, on y croise du monde.

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Petit clin d'oeil choco : le Plateau de Tell est tellement populaire en Suisse que même les chocolatiers y font leur pub. C'est le plus gros carillon du monde, vous remarquerez la subtile intégration dans le paysage. Un gros jouet qui sonne 10 minutes chaque heure, et les touristes peuvent presser sur les boutons.

La Légende de Tell fait aussi les choux gras du Troquet du coin, décidément, on en sort pas. D'ailleurs, pour embrasser cette vue, c'est consommation obligatoire. Une vue ... imprenable. Alors on s'étonne pas lorsque les gérants nous affirment que Guillaume Tell a bien existé.

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Mais l'histoire de Guillaume Tell ne se termine pas là. Nous retournons dans sa vallée natale du Schächental, traversée par le Schächen. Et croyez-moi, ça se mérite le titre de légende. C'est dans ces eaux limpides que Guillaume Tell serait vaillamment mort, sauvant un enfant de la noyade.

Nous avons sillonné le canton d'Uri, sur les traces ancestrales de cette légende, qui fait vivre les commerces et rêver les enfants. Notre enquête se termine là, et nous l'avons notre réponse. Guillaume Tell a bel et bien existé, oui. Dans le coeur des habitants de sa région.